samedi 26 juin 2021

Réponse à une femme exceptionnelle sur facebook

 Chère Marie-Elaine

J'avais écrit une longue réponse à ta question: quand reviendras-tu au Québec? Que j'ai perdue.

Je vais essayer de la résumer ici.

Depuis l'annonce, au mois de février, il ne se passe pas un jour sans que j'angoisse à l'idée de revenir avec comme épée de Damoclès, cette mesure répressive d'envoyer pendant trois jours les voyageurs à l'hôtel - prison.

Je réfléchis et j'explore l'idée de ne pas rentrer. Je ne me sens plus appartenir à un pays qui adopte une mesure non pas sanitaire ou scientifique mais une mesure dissuasive.

J'ai exploré aller vivre au Maroc mon pays natal que j'ai quitté à l'âge de 12 ans pour le Québec. Mes amis proches seraient ravis que j'y vive. Mes deux grands-pères y sont enterrés au cimetière Ben'sick.

Puis j'ai exploré d'aller en Israël où vit une partie de ma famille. pays de ma grand-mère paternelle qui y est enterrée avec mes ancêtres.

J'ai aussi pensé vivre à Paris avec ma soeur.

Puis j'ai encore reculé car mon père vit encore au Québec et mes enfants qui se disent Québécois de souche (Hum!) y vivent ainsi que mes petits-enfants. Mais voilà le seul parti qui a défendu les Canadiens contre cette mesure incroyablement répressive, y compris selon un rapport commandé par le fils de... , c'est le Parti Conservateur et Éric Duhaime.

Même le parti auquel j'ai contribué à bâtir avec Lucien Bouchard, s'est mis du côté de la répression sans justification scientifique. Comme s'ils étaient aussi atteints du syndrome de la punition. Simplement pour plaire à une partie de l'électorat envieuse et jalouse de ceux qui ont voyagé en disant qu'eux se sont sacrifiés et ont été solidaires en restant au pays.

Ils ont oublié ces envieux que les immigrants n'ont pas tous de la famille au Québec ou au Canada. Et qu'ils ont peut être d'autres contraintes et ont été obligés de voyager. Bref.

Depuis le mois de février, chaque jour, j'ai jonglé et je suis déchirée. Je ne me sens plus appartenir à un monde de délation et de répression inutile, mesure appliquée pour dissuader les joyeux gai-lurons qui voulaient aller dans le sud, encouragés qu'ils étaient par les compagnies aériennes qui multipliaient leurs pubs sur toutes les plate-formes au mois de décembre pour ensuite avaler l'argent des voyageurs.

J'ai refusé les vaccins que me proposaient les Espagnols car le fédéral ne les reconnaissaient pas. Voilà que depuis quelques jours, il les reconnait. Bref. Je ne sais pas encore si je reviendrais un jour. Peut être physiquement, à reculons, mais plus dans ma tête ni dans mon coeur.

Je ne me sens plus appartenir à un monde de délateurs ni à un pays de plus en plus répressif.

Peut être une image de dehors
Michel Laflamme et Fatiha Poivey
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dimanche 20 juin 2021

Pas de chicanes dans ma cabane

Jérôme Blanchet-Gravel, journaliste, écrivain et chroniqueur à QUB radio, rédigeait un post sur Facebook qui commençait ainsi : « Il faut passer du temps à l’étranger pour réaliser à quel point il est devenu difficile de débattre au Québec, et même d’entretenir des amitiés avec des gens qui ne partagent pas nos idées. »

Cher Jérôme Blanchet-Gravel, je partage ton opinion et j’irai plus loin. Je sais que tu me le permets, puisque c’est bien là ton propos. J’appréhende mon retour au Québec après avoir pris l’habitude en Europe de débattre, même avec des amis policiers de droite comme de gauche, (oui! oui! ça existe!), faisant partie de la même famille; d’écouter des émissions de télévision de débats. De réels débats et d’expressions de points de vue différents de la pensée main stream.


Pensées polarisantes valorisées

Lorsqu’on a pris goût à exprimer librement les nuances qui nous habitent et nous viennent en tête, lors de discussions, nous nous rendons compte, depuis l’Europe, que les pensées polarisantes ou binaires, pour ou contre, sont valorisées pour exclure, étiqueter. Il est certain que c’est plus sécurisant et confortable pour certains. Malheureusement, les sculptures des trois singes – entendre, voir et se taire – sont alors de mise.





Un exemple plus près de nous. J’ai, dans un texte bien personnel, critiqué les mesures abusives  prises par le gouvernement du Québec qui a fortement incité celui du Canada à la fermeture des frontières et à la quarantaine à l’hôtel pour les voyageurs à des frais exorbitants, par mesure dissuasive de voyager. Passant du peu de contrôle à un contrôle policé. Mesure dénoncée par les Conservateurs canadiens et par Éric Duhaime, chef du Parti conservateur du Québec, qui se fait un devoir de souligner les incohérences politiques pour ne pas tomber dans la pensée unique. Notez que je suis péquiste depuis que le PQ existe.




Certains m’ont signifié que je critiquais et remettais en question cette mesure, parce qu’elle m’atteignait personnellement. 

Si j’étais restée au Québec, j’aurais été encore plus virulente, sachez-le. 

C’est comme utiliser un bazooka pour tuer des moustiques. 

Depuis l’idée même de son application, je savais que cette mesure ne tenait pas la route d’un point de vue sanitaire et coûterait des millions à mettre en place, alors que les besoins criants de financement se font sentir en santé, dans la recherche pour le cancer, le sida, contre la violence faite aux femmes et aux familles, pour l’éducation, pour les enfants abandonnés, etc.


Plus de 33 millions de dollars en contrats privés

« La surveillance de la quarantaine obligatoire aux frontières du Canada a coûté plus de 33 millions de dollars à Ottawa en contrats privés accordés à des firmes spécialisées en sécurité, » rapportait Le Devoir.


Il y a deux semaines, un rapport commandé par le premier ministre du Canada reprenait scientifiquement les mêmes arguments, de non-sens sanitaire, de fardeaux pour les voyageurs essentiels, de dépenses exorbitantes et injustifiées de fonds publics, tout en empêchant les familles de se retrouver alors que selon le même article : « 98,6 % des personnes qui sont entrées au pays par les airs n’étaient pas porteuses de la COVID-19, ont indiqué les tests obligatoires effectués à la frontière; 99,7 % des voyageurs entrant par la route se sont retrouvés dans la même situation. »


Au lieu d’y voir une voix dissidente par simple bon sens, je suis passée pour une complotiste. Même Facebook s’y est mis. C’est à se demander si leurs censeurs savent lire et faire les nuances appropriées.


Complotiste alors que l’on respecte le port du masque, les gestes barrières et le lavage de mains. Notez que pour ma part, nul besoin de rappeler à longueur de journée le lavage de mains : mes parents m’ont bien éduquée.


Ce qui me sidère est que ce qui précède est aussi valable pour les médias. Difficile d’écouter quelques jeunes journalistes qui, au lieu de questionner, d’analyser, de rendre compte, font des topos dont le contenu incite, par le vocabulaire et les pronoms utilisés, les spectateurs à comprendre que les directives gouvernementales sont paroles d’évangile. Sans enquête. 


L’avenir des médias

Je ne parle pas des éditorialistes, mais des jeunes journalistes. Ça augure mal pour l’avenir des médias. Les gouvernements n’ont plus besoin d’engager des entreprises de communication ou de relations publiques. Ils ont de parfaits haut-parleurs qui feront le suivi adéquat, doublant et triplant ainsi leur effet après leur conférence de presse quotidienne, un rituel installé depuis le début de la pandémie.


Sans vouloir jouer les belles-mères ou les « de mon temps, c’était mieux », puisque j’en ai discuté avec de jeunes journalistes allumés, il serait approprié que les rédacteurs en chef jouent un rôle plus marquant pour pousser les jeunes à aller plus loin dans leur enquête, qui se résume parfois à n'interroger qu’une personne pour en faire une généralité. J’écoute ces topos et je suis étonnée que ça puisse passer.


J’ai été au pupitre de diverses salles de rédaction et je ne manquais pas de demander à un journaliste de reprendre un laïus, d’ajouter des entrevues pour amenuiser, nuancer ou contrebalancer, « tant le jupon dépassait ». 


Passe encore pour le commun des mortels – est-ce un héritage anglo-saxon? peut-être  –, mais du point de vue médiatique, c’est impardonnable.


J’écoutais, par exemple, le journaliste du Figaro, Ivan Rioufol, sur CNews en France, défendre dès le début de la pandémie le professeur Didier Raoult, l’utilisation de l’hydroxychloroquine et l’azithromycine, les libertés individuelles et collectives, et de mettre en évidence les contradictions médicales ou gouvernementales.


Chaque jour, je résonnais en bonne Québécoise en me disant qu’ils finiront par ne plus l’admettre sur leurs plateaux, c’est certain. Or, à mon grand étonnement et plaisir, non seulement il allait toujours plus loin quotidiennement, mais les patrons de la chaine de télévision lui ont offert pendant l’hiver une tribune hebdomadaire le dimanche soir à heure de grande écoute pour exprimer sa dissonance : Les Points sur les i.


Il est vrai que les « pas de vagues » ou « pas de chicanes dans ma cabane » font partie du folklore des expressions québécoises.


C’est aussi ce qui fait le charme des Québécois, avouons-le.

lundi 14 juin 2021

Au Maroc, on réunit les familles !

 Pendant que le premier ministre canadien se rend au G7: 

- Ne respecte pas les gestes barrières

- Ni le port du masque

- qu’il continue sa mesure honteuse de faire payer aux ressortissants canadiens 2000 $ pour 3 jours d’hôtel afin d’attendre un résultat de test qui prend 20 min à obtenir dans les pays civilisés, le roi du Maroc ordonne aux compagnies aériennes de baisser leurs prix pour permettre aux familles de se réunir. 😍

Je me souviens avec amertume que l’année dernière alors que nous avions beaucoup de difficulté à revenir au Canada, les partis politiques fédéraux y compris le Bloc sauf les Conservateurs exigeaient le retour au pays des ressortissants canadiens sous peine d’amende. Alors que Air Canada demandait 5848 $ pour un vol de retour. Non seulement nous étions dans le stress de ne pas pouvoir revenir mais ils enfonçaient le clou. C’est dans les moments de crise que l’on reconnaît les grands. 

Les joueurs de hockey peuvent entrer sans faire de quarantaine à l’hôtel? Ah oui! Bien sûr, ça c’est le bonbon pour vous faire obéir. 

Le monde est de plus en plus à l’envers. Les Conservateurs deviennent progressistes et les gauchisants se transforment en fasho. Allez comprendre quelque chose maintenant. 

Bravo au roi du Maroc de se préoccuper des réunions familiales! 🙏👏👏👏👏👏👏

Un pays ? C’est ainsi que doit se comporter un leader d’un pays.

Au Maroc, «selon le pays, les voyageurs devront présenter un test PCR négatif de moins de 48 heures pour les personnes non-vaccinées, celles vaccinées étant dispensées de test si elles présentent un pass vaccinal ou un certificat.»

dimanche 13 juin 2021

Mon père s'excuse !

Mon père a 93 ans. Tous les 13 avril, il nous pose la même question. Je l’ai d’ailleurs raconté sur ma page facebook. 

  • Vous êtes contents qu’on ait choisi le Québec pour y vivre? 

Et chaque année, ma sœur et moi le remercions d’avoir choisi le Québec.


Notre père est enfermé dans sa chambre dans un Centre privé pour personnes âgées à Montréal depuis le mois de mars 2020. Comme il est handicapé physiquement, ça fait un an et demi qu’il n’a vu que sa chambre, sa télévision, sa fenêtre qui donne sur l’oratoire Saint-Joseph et les préposées qui passent le voir. 



Entre juillet et novembre 2020, je n’ai pu rentrer dans sa chambre que 5 fois, habillée en scaphandre, alors qu’avant la pandémie, je passais des heures avec lui trois ou quatre fois par semaine parfois plus à regarder la télévision ou à écouter de la musique arabe ou américaine des années 40. 


En octobre 2020, je parlais à l’infirmière qui le visite parfois et je lui demandais qu’elle lève cette interdiction car je suis la seule à lui rendre visite. Elle me répond qu’elle ne peut pas. Je la mets au courant du fait que je dois partir en Espagne pour finaliser des documents gouvernementaux officiels. Elle me conseille, non seulement de partir mais m’informe que le Centre ne serait pas ouvert à son avis avant le printemps ou l’été 2021.


Ma sœur qui vit à Paris et moi devions rentrer le 1er mai à Montréal pour enfin voir notre père que nous appelons au téléphone tous les jours. Sa voix s’éteint un peu plus chaque jour. Et il commence à répéter les mêmes phrases. 


Or, voilà que depuis le mois de février, il y a une obligation de faire trois jours d’hôtel – prison en arrivant sur le sol canadien à nos frais. Ce qui veut dire pour ma sœur et moi, retraitées, 4000 $ alors que nous sommes devenues le soutien financier de nos enfants qui ne travaillent pas depuis un an et demi. Les grands spectacles ayant été annulés. 


Et nous étions craintives et passibles de l'attraper à l'hôtel alors que nous sommes si prudentes. 


Cette aberration copiée des pays insulaires a été dénoncée par un seul parti politique : les Conservateurs aussi bien à Ottawa qu’au Québec par leur nouveau chef Éric Duhaime


J’ai écrit plusieurs post depuis des mois sur facebook pour dénoncer cette mesure purement politique d’autant que tous les virologues du monde, enfin ceux qui ont de la crédibilité, pas ceux qui sont titulaires de chaires Pfizer ou Moderna, s’entendent pour dire que le virus se développe entre 3 et 10 jours. 


Je vous avoue que je lis tout ce qui s’écrit et se dit en Allemagne, en Italie, en Espagne, en France et au Maghreb. Personne n’a exigé une mesure aussi répressive. Pas même l’Arabie Saoudite qui a transformé ses hôtels en clinique surveillée, par des médecins et infirmières pour isoler les malades ou les voyageurs au frais de l'état. 


Les autres partis politique du Canada et du Québec, se sont tous pavanés devant les écrans, le sourire aux lèvres pour demander que cette mesure soit même renforcée pour les voyageurs qui passent par la frontière terrestre. Ce sourire est imprimé dans ma mémoire à jamais. L'arrogance exprimée était tellement empreinte de mépris pour les immigrants qui n'ont pas toute leur famille sur place. 


Il y a une semaine, un rapport stratégique sur la quarantaine a été rendu publique et aussitôt balayé du revers de la main par les politiciens qui souhaitent continuer à appliquer cette mesure répressive qui n’a aucune valeur ni sanitaire ni scientifique.


Sondages et clientélisme électoral oblige ! Ou diversion, c'est selon. 


Le Premier ministre du Canada, qui a lui-même commandé cette étude, ne l’applique pas jusqu’à nouvel ordre. 


Qu’en est-il de mon père? Nous l’avons mis au courant du fait que nous ne pouvons pas rentrer chez nous et lui avons expliqué cette mesure mille et une fois pour qu’il comprenne pour quelle raison, nous ne rentrons pas. 


Ce n’est que cette semaine qu’il a allumé. Il ne cesse depuis de s’excuser d’avoir choisi le Canada et de nous avoir entrainés alors que nous voulions vivre en Europe. Il m’a encore répété hier dans son vocabulaire :

  • Je m’excuse de ne vous avoir écoutés même si vous étiez enfants. Je croyais que nous vivions au Canada dans un beau pays qui défend les gens. Je m’excuse. Je regrette d’avoir voté pour ce parti politique toute ma vie.


Ses excuses m’ont crevé le cœur. Je regrettais de lui avoir expliqué pour quelle raison nous ne rentrions pas. Depuis, il ne cesse de répéter ses excuses. 


Je lui ai dit que seul le parti conservateur défendait ses valeurs et ses principes. Qu'il aurait dû voter Conservateur.


Qu’à titre d’exemple, le communiqué ci-après, depuis cette mesure prise par les libéraux, les Conservateurs sont les seuls à avoir dénoncé ces mesures et leur incohérence. 


Hier soir, nous avons vu ce film Le Père et nous regrettons d’avoir expliqué à notre père que nous ne pouvons pas rentrer chez nous parce qu’on nous oblige à passer une quarantaine à l’hôtel - prison. Il répète exactement comme dans le film. 

Il s’excuse sans arrêt maintenant d’avoir choisi le mauvais pays. 














mardi 8 juin 2021

Tendance Complot


Alors que Vincent’s Guzzo, entrepreneur des cinémas du même nom, a décidé de présenter le film Hold up, que plusieurs ont été choqués sur les réseaux sociaux pour la visibilité qui sera donné à un film « complotiste », que Stefan Bureau interview le Dr Didier Raoult, qualifié d’invité radioactif, sur les ondes de Radio Canada, au grand déplaisir d’autres animateurs qui en questionnent le but, deux lectures me reviennent à l’esprit tant leur contenu est plus que jamais d’actualité : le livre de Claude André, auteur, Quand la clique nous manipule, préfacé par le regretté Bernard Landry, premier ministre du Québec, sorti en septembre 2018. 
Et plus récemment lu, La Tyrannie de la Visibilité, un nouveau culte démocratique, de Philippe Guibert, essayiste français.
 
Les deux dressent un état ou plutôt une cartographie des lieux, l’un partant du Québec et l’autre de la France, pour décrire notre monde actuel et virtuel.
 
Trump le provocateur
Deux livres qui recadrent et replacent les pendules à l’heure sur l’identité de la clique qui manipule et sur la tyrannie de la visibilité par l’utilisation de l’objet dorénavant plus qu’essentiel, la « prothèse privilégiée », le cellulaire ou téléphone intelligent, smart phone pour les Français, tel que défini par l’essayiste français.
 
Les deux livres se penchent sur le cas de Trump, l’un pour décrire le côté provocateur et insolent de Potus45 et l’autre pour analyser la campagne électorale américaine de 2016 sous l’angle du conspirationnisme et du complotisme. Mot de l’heure qui a pris un sens plus soutenu depuis le début de la pandémie en 2020.
 
Retour dans le temps. Le livre de Philippe Guibert est paru fin janvier 2020, alors que nous commencions à peine à nager en pleine tyrannie sanitaire, figés par la peur et par les accusations de complotisme qui naîtront très vite envers quiconque critique les décisions prises par les divers gouvernements.
 
D’abord les formules chocs
L’auteur a des formules chocs, j’aurais pu en répertorier une centaine, toutes plus réalistes les unes que les autres, pour exprimer la décadence provoquée par la tyrannie des médias sociaux sous entendant la visibilité nécessaire des utilisateurs pour mieux se sentir exister.
 
« Je souffre » ou « j’aime » sont des expressions que nul autre que moi ne peut contester ou accréditer… « c’est lui qui m’a agressée » attestation que l’enquête judiciaire aura la tâche d’établir. »
 
Le monde à l’envers. D’abord on accuse publiquement et ensuite on passe à l’enquête. De toutes les manières, le dommage est fait et c’était le but. Non?
 
Voilà pour les dénonciations personnelles.
 
Ajoutons à ces « visibilités nécessaires », sous forme de selfies et autres, le concept des petites poucettes chères à Michel Serres, que Philippe Guibert caractérise par « une forte visibilité sans notoriété préalable », c’est-à-dire celui « qui acquiert une foule d’abonnés, signe d’une réalisation de soi. »
 
Les trois rites du culte de la visibilité
Selon l’auteur, trois rites du culte de la visibilité se résument ainsi : « Le récit de ce qui nous arrive en tant que collectif… le récit de ce qui pourrait m’arriver en tant que personne… enfin, ce qui m’arrive effectivement, ma vie, mon identité narrative… que nous irons jusqu’à montrer, par les « post » ou « story » sur nos réseaux sociaux. »
 
Philippe Guibert décrit un monde virtuel messianique : « Au Commencement sera l’Alerte : dis-moi quelles sont tes applis, alertes et notifications et je te dirais qui tu es et les infos dont tu as besoin… être alerté, c’est entrer dans le cercle de ceux qui savent. ».
 
Sur les pouvoirs actuels de l’invisibilité de la visibilité dans la course aux likes où Narcisse n’en finit plus de se mirer, chacun se raconte à coup d’algorithmes et autres considérations virtuelles provocatrices et polarisantes de notre siècle.
 
La toute puissance des réseaux sociaux comme relais « tout le monde doit savoir, puisque nous devons tous être égaux devant l’information. »
 
Rien n’est plus d’actualité que ces chapitres consacrés au complotisme » pour lancer ces « fake visibles », « complotisme chic », qui répond donc au « complotisme trash ».
 
Il questionne : « le complotisme ne serait-il pas d’abord cette réaction trop humaine devant tout événement qui déroute les habitudes de pensée, les croyances les plus profondes et plus encore les plans prévus. »
 
Il y a quelques jours sur facebook, après la dérive et les propos indignes du candidat à la présidentielle en France, prédisant comme il y a quatre ans, un « grave incident, ou un meurtre dans la dernière semaine de la campagne présidentielle 2022 », l’essayiste français a écrit en riposte que « le dernier degré dans la déchéance, complotiste et clientéliste, pour ne pas dire communautariste, de Jean-Luc Mélenchon, a été atteint aujourd’hui. »
 
Clientélisme est le mot-clé en France comme au Québec où la clientèle visée est celle antisémite, n’ayons pas peur des mots, depuis qu’une motion de définition de l'antisémitisme proposée par la Coalition Avenir Québec (CAQ) a été refusée par le parti politique Québec solidaire.
 

Claude André, à propos de la clique, mentionne qu’« on ne pourrait analyser sérieusement une stratégie de marketing politique sans se référer à la notion de cadrage qui est fortement utilisée, chez les populistes de droite comme de gauche… ces cadres indiquent aux citoyens la façon dont ils doivent jauger des événements… en concurrence dans le débat politique quotidien. »
 

L’arrogance contrariée selon Philippe Guibert
Un chapitre consacré à la géopolitique décrit notre rapport au monde par le biais de l’information et de l’image-son diffusés, Guibert avance que « nous sommes myopes en géopolitique : le lointain est flou, et l’invisible au prime abord y est décisif ».
 
« Exit la conscience, de soi ou du monde, nous entrons dans la story personnelle et la Série collective par nos petits écrans. »
 
Pour sa part, mobilisant des auteurs bien connus, dont la sociologie bourdieusienne et le spécialiste de la propagande, Jacques Ellul, Claude André pointe l’approche d’un Chomsky qui affirme, en substance, que « les médias se livrent à une propagande qui sert les intérêts des puissantes firmes qui les contrôlent en les finançant et dont les représentants sont bien placés pour orienter l’information. »
Pour l’enseignant au collégial, la logique calculatoire du marketing électoral transcende désormais la vertu. Ainsi, le populisme et ses adeptes usent des ressorts du complotisme et cela autant à droite qu’à gauche du spectre politique.
 
La vérité sur la démocratie, est-elle gagnante? Non, conclut Philippe Guibert, pas même les droits de l’homme.
 
Une résistance, encore aux premiers balbutiements, s’est établie contre la pensée unique de la bien-pensance qui ne peut pas gagner dans ce monde, de plus en plus dénué de sens critique que certains voudraient tristement voir aseptisé.
 
Deux livres percutants pour mieux définir les enjeux manipulatoires et mieux nous orienter dans les méandres tyranniques de l’espace virtuel.
 
Guibert Philippe, La Tyrannie de la Visibilité, un nouveau culte démocratique, VA éditions, Collection Influence et Conflits, Janvier 2020, Paris, 140 pages.
 
André Claude, Quand la Clique nous manipule, du Printemps érable à Donald Trump, éditions Dialogue Nord-Sud, Septembre 2018, Montréal, 250 pages.