Le chef du Parti québécois, Paul Saint-Pierre Plamondon prêtait « serment sincère au peuple québécois », le 21 octobre 2022, suivi des deux autres députés élus, Joël Arsenault et Pascal Bérubé.
Lorsque le chef du PQ a prononcé ces paroles, il m’était impossible de contenir ma joie.
Celle d’avoir été témoin de l’obstination de trois députés de refuser de se soumettre à l’indicible: l’allégeance au nouveau roi d’Angleterre.
Les plaines d'Abraham
Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à la bataille sur les Plaines d’Abraham en m’imaginant le désespoir ressenti le lendemain par les Canadiens français vivant sur le sol de la Nouvelle-France. Et à Celui d’Abraham Gradis, juif de Bordeaux, qui avait affrété tant de bateaux, remplis d’armes et de munitions de guerre pour soutenir le général Montcalm, ses troupes et les Canadiens français.
Général Montcalm(avec la permission de Charles William Jefferys/Bibliothèque et Archives Canada/e010999530)
Déclaration de Balfour en 1917
Pas non plus empêchée de penser à la déclaration de Balfour en 1917, qui devait mener à la scission par les Anglais d’un foyer juif et d’un foyer arabe en Palestine mandataire.
Qui, si elle avait été appliquée et non détournée de son mandat premier, aurait pu sauver les millions d’assassinats des Juifs du siècle dernier.
Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à la duplicité des Anglais et à leur complicité aux détenteurs du précieux or noir.
Je n’ai pas pu m’empêcher non plus de repenser aux différents livres blancs que l’Angleterre s’évertuait à produire au fil des années du siècle dernier pour satisfaire le monde arabe et son pétrole si convoité au point d’en oublier la défense des droits humains les plus fondamentaux et la démocratie à protéger.
Vous connaissez les 3 livres blancs que l’Angleterre a produits qui ont fait retarder l’application de la déclaration de Balfour après 1917, sur l’avènement d’un foyer juif en Palestine ?
Un rappel :
· Le 1er livre blanc en 1922 restreignait le territoire destiné aux Juifs donc à l’établissement d’un foyer juif en Palestine comme le prévoyait la déclaration de Balfour en 1917. Avec pour conséquence, le pouvoir et le contrôle des terres à l’émir de l’époque.
· Le 2e livre blanc en 1930 qui a remis en question l’implantation de colonie juive en Palestine empêchant les Juifs vivant déjà en Palestine de travailler ou de développer leurs propres terres ou d’ouvrir des entreprises.
· Le 3e livre blanc en 1939, le pire de tous, celui qui a signé l’arrêt de mort des 6 millions de juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, interdisait aux Juifs de massivement se tourner vers la Palestine terre promise mais également interdisait à ceux vivant en Palestine de continuer à acheter des terres aux Arabes et de les exploiter. La restriction des visas et des passeports attribués aux Juifs est une tache noire que l’Angleterre portera toujours en son sein.
À la fin de la guerre, non contents de satisfaire leurs alliés arabes, les Anglais empêchaient les rescapés de la Shoah de se diriger vers la « terre promise » en les parquant dans des camps.
À Chypre ou au Kenya
Je repensais aussi à la politique d’immigration antisémite des paroles d’un fonctionnaire de Mackenzie King qui avait répondu à la question : combien de réfugiés juifs, il accepterait au Canada? Il avait répondu « aucun, c’est encore trop ». Décision qui a mené à l’incident du paquebot Saint Louis.
Trois députés et leurs principes
Si bien que lorsque les trois députés péquistes de l’Assemblée nationale du Québec, Paul Saint-Pierre Plamondon, Joël Arsenault et Pascal Bérubé ont porté « serment sincère au peuple québécois » je n’ai pas pu m’empêcher de repenser à ce qui précède et à les en féliciter.Je me suis toujours demandée pour quelle raison les Juifs montréalais se ralliaient aux Anglais et non aux Canadiens français, aux Québécois francophones, alors qu’il y avait aussi une longue tradition d’antisémitisme au Canada anglais malgré les excuses publiques récentes de plusieurs dirigeants.
Il faut se mettre dans l’histoire pour comprendre ma joie de voir ces trois députés défier la tradition ainsi que ma fierté d’avoir soutenu le peuple québécois pendant des dizaines d’années et d’en être partie prenante.
Nous, les Juifs de culture ou de religion, pouvons comprendre la lutte à mener pour protéger une langue, une culture, un drapeau, des traditions, un territoire, une nation.