La nuit dernière, c’était la nuit des sans-abri. Une nuit par année pour NOUS sensibiliser aux milliers de personnes qui dorment dans les rues chaque soir faute de toit pour s’abriter des intempéries.
La Nuit des Sans-Abri ne sera pas mon propos. C’est ce qui a
servi de déclencheur à ce billet.
Ce déclencheur est en réalité la réflexion faite par Émilie
Dubreuil à Radio Canada, alors qu’elle commentait en direct au Téléjournal de
18 h, la manifestation de soutien aux sans-abri, qui se tenait à Montréal.
Au début de son reportage, Mme Dubreuil faisait la réflexion
suivante : « la nuit des sans-abri sert à attirer l’attention des
médias sur ce problème… » La suite...
Reportage d'Émilie Dubreuil - Radio Canada
Reportage d'Émilie Dubreuil - Radio Canada
Ici j’ai arrêté d’écouter. Je repensais immédiatement à un article lu, il y a quelques années, que je cite plus bas.
Entendons-nous, je pense qu’Émilie Dubreuil est une honnête journaliste de terrain et loin de moi l’idée de faire ici une critique de son travail. Le lapsus ou la métonymie employée au début de son reportage, a été très significative du rôle que les médias en général s’octroient et qui semble leur être dévolu.
Entendons-nous, je pense qu’Émilie Dubreuil est une honnête journaliste de terrain et loin de moi l’idée de faire ici une critique de son travail. Le lapsus ou la métonymie employée au début de son reportage, a été très significative du rôle que les médias en général s’octroient et qui semble leur être dévolu.
Car, il faut les attirer pour que les sujets qu’ils couvrent
méritent l’attention du public, des décideurs, des politiciens, etc.
Demandez aux
Organisations non gouvernementales (ONG) tous les efforts qu’elles déploient
pour attirer l’attention des médias. Alors que les moindres déplacements et le moindre geste
de nos représentants gouvernementaux sont suivis et scrutés à la loupe.
Le journaliste de terrain, le journaliste d’enquête, le rédacteur, l’éditorialiste, le commentateur, l’animateur, le blogueur… il y a en ce moment un tel amalgame que l’on comprend que la population s’y perde.
Je repensais à la semaine d'information et d'actualités vécues ailleurs : l’interdiction
des chaines satellitaires iraniennes …
Et ici : La Commission Charbonneau, les témoignages de
Lino Zambito, celui de Gilles Surprenant, la démission de Véronique Hivon, le
refus du CRTC à la fusion de Bell et d’Astral et également à l’intervention d’Alain
Saulnier à l’émission Bazzo.tv de Marie-France Bazzo et à son article d’hier
dans le Devoir.
J’inscris volontairement tous ces éléments d’actualités sur
le même pied d’égalité. Car les émissions d’Affaires publiques ou celles de
variétés informent tout autant que les actualités qui y sont analysées.
Preuve en est la citation d’extraits des émissions de
variétés au téléjournal : aujourd’hui, les extraits de l’entrevue accordée
par Lino Zambito à Guy A. Lepage et à Dany Turcotte à l’émission Tout le Monde
en Parle (TLMEP), enregistrée jeudi qui sera diffusée demain soir.
Enfin! Une ouverture et non un cloisonnement des secteurs d’activités.
Là le web joue un rôle de précurseur.
Revenons à l’émission Bazzo.tv diffusée jeudi dernier. J'étais
donc d’accord avec Alain Saulnier, un ancien collègue de Radio Canada, jusqu'au moment où il a mentionné que les personnes qui se retrouvent dans les médias
sociaux sont en quête de célébrité.
Une parenthèse. Ce n’est pas la première fois qu’on entend
cela. Et il n’y a rien de plus distortionné que cette affirmation.
Ceux qui utilisent les médias sociaux, je pense à facebook ou c’est plus vrai pour twitter, sont pour la plupart d’entre eux des gens curieux, des acteurs citoyens friands d’actualités, de politique, qui ont, non seulement envie de s’exprimer mais, en le faisant, ont le sentiment de faire partie prenante de la société dans laquelle ils vivent. Ils ne se sentent plus uniquement spectateurs. Chacun, à sa manière et avec les moyens à sa portée, a l’impression de faire avancer les débats.
Ceux qui utilisent les médias sociaux, je pense à facebook ou c’est plus vrai pour twitter, sont pour la plupart d’entre eux des gens curieux, des acteurs citoyens friands d’actualités, de politique, qui ont, non seulement envie de s’exprimer mais, en le faisant, ont le sentiment de faire partie prenante de la société dans laquelle ils vivent. Ils ne se sentent plus uniquement spectateurs. Chacun, à sa manière et avec les moyens à sa portée, a l’impression de faire avancer les débats.
C’est l’individu au sein d’une collectivité bien vivante et
surtout réagissante. Parfois trop vite.
Preuve en est le nombre de journalistes et de recherchistes
qui suivent ce qui se dit sur le fil twitter et sur les murs facebook ou même
sur les blogs pour s’en inspirer dans leur travail de communicateurs. Les
centres de documentation n’ont plus tellement la cote. Le web en mène assez large.
Je reviens à Alain Saulnier. Hier, il publiait un texte dans
le Devoir, dans la section Libre opinion, le texte intitulé: L’Âge d’or du journalisme d’enquête.
Je n’ai lu cet article, que tard hier soir, longtemps après
avoir réagi à la réflexion de Mme Dubreuil.
« Les
journalistes dit-il, doivent éviter de se transformer en justicier ou en héros des
temps modernes. »
J’ai repensé à la réflexion d’Émilie Dubreuil : « attirer
l’attention des médias. »
Lorsque elle a prononcé
cette phrase, je l’ai mentionné plus haut, elle n’avait malheureusement pas
tort. Quand les médias sont interpellés par miracle, justice est
faite, la diversion ne fonctionne plus. Les projecteurs sont allumés.
Et la nuit des sans-abri en est un bon exemple puisque au fil
des ans, le Cirque du Soleil, les petits déjeuners du cœur, le réseau, etc. s’y
sont impliqués.
Je ne suis pas d’accord avec Alain Saulnier lorsqu'il dit
que nous vivons en quelque sorte « l’Âge d’or du journalisme
d’enquête ». A mon humble avis, nous n’en sommes qu’aux premiers
balbutiements et c’est tant mieux.
Nous connaissons le travail d’Alain Gravel, de celui de
Marie-Maude Denis. Des journalistes de ce calibre, conscients du rôle qui leur
est dévolu et de celui qu’ils jouent au sein de la communauté journalistique
sont rares. Ils ne sont pas contaminés par la célébrité à tout prix. Il est vrai que ce
journalisme d’enquête n’a pas fini de nous étonner.
Contrairement à M. Saulnier, je pense qu’il y a une
dégradation des médias et c’est tant mieux aussi.
Cette dégradation lui permettra de se redéfinir parce que le public n’est plus tenu dans l’ignorance ou dans la médiocrité.
Avançons un peu plus loin, grâce aussi un peu beaucoup aux médias sociaux.
Cette dégradation lui permettra de se redéfinir parce que le public n’est plus tenu dans l’ignorance ou dans la médiocrité.
Avançons un peu plus loin, grâce aussi un peu beaucoup aux médias sociaux.
Entre le journalisme d’enquête - celui de l’émission Enquête
- et le journalisme terrain, pensons à la couverture de CUTV et de la
journaliste Laura Kneale, pendant le printemps érable, il y a celui de trouver
le moyen d’informer, de rester dans l’actualité, celui de l’analyse de cette dernière. Bien entendu, celui
de rapporter avec le plus de précision possible et d’esprit analogique, de
synthèse ce qui se passe.
Ce qui nécessite une gymnastique, entre la neutralité factuelle et le commentaire presque impossible à éviter.
Ce qui nécessite une gymnastique, entre la neutralité factuelle et le commentaire presque impossible à éviter.
Là où je rejoins Alain Saulnier, c’est lorsqu’il dit :
« Les institutions démocratiques sont perfectibles,
certes, mais en même temps très fragiles et elles doivent être protégées. »
Oui! Mais…
Le rôle des journalistes n’est pas celui de protecteur des
institutions démocratiques. Il est, entre autres, celui de forcer ces mêmes
institutions à la transparence en rendant publics les abus qui y sont faits. Le
journaliste joue un rôle de vigilance et de connaissance, non superficielle, de
ces mêmes institutions.
Par contre, c’est le rôle et la responsabilité de TOUS les citoyens de protéger les
institutions démocratiques et pas seulement celle des journalistes.
Et, pour que ces citoyens ne soient pas désabusés et les
défendent, il ne faut pas qu’elles les déçoivent au point qu’ils perdent
confiance en elles et en leur rôle essentiel au sein du système.
Là interviennent les nuances
journalistiques.
« Si le langage n’exprime avec précision qu’une
intensité moyenne de la pensée, c’est parce que la moyenne de l’humanité pense
avec cette intensité; c’est à cette intensité qu’elle consent, c’est de ce degré
de précision qu’elle convient. Si nous n’arrivons pas à nous faire entendre
clairement, ce n’est pas notre outil qu’il faut accuser… »
René Daumal
Cette analyse plus bas écrite, en septembre 2010 par mon compatriote d'origine, Sylvain Timsit, est plus que pertinente. Elle traite des dix stratégies de manipulation des masses et en détaille "l’éventail, depuis la stratégie de la distraction, en passant par la stratégie de la dégradation jusqu’à maintenir le public dans l’ignorance et la médiocrité. »
Les dix stratégies de manipulation de masses:
Paris- Ecrit
par: Sylvain
Timsit Date de publication: 21 septembre 2010 Dans: Europe, International, Opinion,
Politique
Politique
1/ La stratégie de la distraction
Élément
primordial du contrôle social, la stratégie de la diversion consiste à
détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations
décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel
de distractions et d’informations insignifiantes. La stratégie de la diversion
est également indispensable pour empêcher le public de s’intéresser aux
connaissances essentielles, dans les domaines de la science, de l’économie, de
la psychologie, de la neurobiologie, et de la cybernétique. « Garder
l’attention du public distraite, loin des véritables problèmes sociaux,
captivée par des sujets sans importance réelle. Garder le public occupé,
occupé, occupé, sans aucun temps pour penser; de retour à la ferme avec les autres
animaux. »
Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »
Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »
2/
Créer des problèmes, puis offrir des
solutions
Cette
méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ». On crée d’abord un
problème, une « situation » prévue pour susciter une certaine réaction du
public, afin que celui-ci soit lui-même demandeur des mesures qu’on souhaite
lui faire accepter. Par exemple: laisser se développer la violence urbaine, ou
organiser des attentats sanglants, afin que le public soit demandeur de lois sécuritaires
au détriment de la liberté. Ou encore : créer une crise économique pour faire
accepter comme un mal nécessaire le recul des droits sociaux et le
démantèlement des services publics.
3/
La stratégie de la dégradation
Pour
faire accepter une mesure inacceptable, il suffit de l’appliquer
progressivement, en « dégradé », sur une durée de 10 ans. C’est de cette façon
que des conditions socio-économiques radicalement nouvelles (néolibéralisme)
ont été imposées durant les années 1980 à 1990. Chômage massif, précarité,
flexibilité, délocalisations, salaires n’assurant plus un revenu décent, autant
de changements qui auraient provoqué une révolution s’ils avaient été appliqués
brutalement.
4/
La stratégie du différé
Une
autre façon de faire accepter une décision impopulaire est de la présenter
comme « douloureuse mais nécessaire », en obtenant l’accord du public dans le
présent pour une application dans le futur. Il est toujours plus facile
d’accepter un sacrifice futur qu’un sacrifice immédiat. D’abord parce que
l’effort n’est pas à fournir tout de suite. Ensuite parce que le public a
toujours tendance à espérer naïvement que « tout ira mieux demain » et que le
sacrifice demandé pourra être évité. Enfin, cela laisse du temps au public pour
s’habituer à l’idée du changement et l’accepter avec résignation lorsque le
moment sera venu.
5/
S’adresser au public comme à des enfants
en bas-âge
La
plupart des publicités destinées au grand-public utilisent un discours, des
arguments, des personnages, et un ton particulièrement infantilisants, souvent
proche du débilitant, comme si le spectateur était un enfant en bas-age ou un
handicapé mental. Plus on cherchera à tromper le spectateur, plus on adoptera
un ton infantilisant. Pourquoi ? « Si on s’adresse à une personne comme si elle
était âgée de 12 ans, alors, en raison de la suggestibilité, elle aura, avec
une certaine probabilité, une réponse ou une réaction aussi dénuée de sens
critique que celles d’une personne de 12 ans ». Extrait de « Armes silencieuses
pour guerres tranquilles »
6/
Faire appel à l’émotionnel plutôt qu’à
la réflexion
Faire
appel à l’émotionnel est une technique classique pour court-circuiter l’analyse
rationnelle, et donc le sens critique des individus. De plus, l’utilisation du
registre émotionnel permet d’ouvrir la porte d’accès à l’inconscient pour y
implanter des idées, des désirs, des peurs, des pulsions, ou des comportements…
7/
Maintenir le public dans l’ignorance et
la bêtise
Faire
en sorte que le public soit incapable de comprendre les technologies et les
méthodes utilisées pour son contrôle et son esclavage. « La qualité de
l’éducation donnée aux classes inférieures doit être la plus pauvre, de telle
sorte que le fossé de l’ignorance qui isole les classes inférieures des classes
supérieures soit et demeure incompréhensible par les classes inférieures.
Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »
8/
Encourager le public à se complaire dans
la médiocrité
Encourager
le public à trouver « cool » le fait d’être bête, vulgaire, et inculte…
9/
Remplacer la révolte par la culpabilité
Faire
croire à l’individu qu’il est seul responsable de son malheur, à cause de
l’insuffisance de son intelligence, de ses capacités, ou de ses efforts. Ainsi,
au lieu de se révolter contre le système économique, l’individu s’auto-dévalue
et culpabilise, ce qui engendre un état dépressif dont l’un des effets est
l’inhibition de l’action. Et sans action, pas de révolution!…
10/
Connaître les individus mieux qu’ils ne
se connaissent eux-mêmes
Au
cours des 50 dernières années, les progrès fulgurants de la science ont creusé
un fossé croissant entre les connaissances du public et celles détenues et
utilisées par les élites dirigeantes. Grâce à la biologie, la neurobiologie, et
la psychologie appliquée, le « système » est parvenu à une connaissance avancée
de l’être humain, à la fois physiquement et psychologiquement. Le système en
est arrivé à mieux connaître l’individu moyen que celui-ci ne se connaît
lui-même. Cela signifie que dans la majorité des cas, le système détient un
plus grand contrôle et un plus grand pouvoir sur les individus que les
individus eux-mêmes.
Pour
lire encore: http://www.syti.net
Le site de la nuit des sansabri :
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire