« Une civilisation démocratique survivra
uniquement si elle fait du langage de l’image un stimuli à la réflexion critique
et non une invitation à l’hypnose. » - Umberto Eco
Cette phrase me revenait en
mémoire chaque fois que passait à la télévision cette vidéo montrant Mme
Pauline Marois tapant sur deux couvercles
de casseroles - en apparence de taille différente. La suite…
Et chaque
fois, je réagissais différemment à ce message publicitaire qui a eu, aussi chez plusieurs d’entre nous, si j’en crois les commentaires lus sur Twitter,
facebook, blog, etc. un effet inverse de celui escompté par le parti libéral du
Québec (PLQ).
Mme Marois
m’est apparue jolie, maladroite, humaine et un brin pince sans rire. J’ai aimé
cette vidéo. Chaque fois un peu plus après chaque diffusion, pour des raisons
différentes.
Mon premier réflexe a été de me demander si nous avions un
problème d’association entre les femmes et les casseroles. Le message lancé par
le parti libéral était-il : voulez-vous confier les rênes de la gestion du
gouvernement à cette femme qui tape sur des casseroles. Pardon, sur des
couvercles?
Je n’ai pas pu m’empêcher de sourire en réfléchissant à
cette possible interprétation du message lancé par le PLQ : il a fallu
deux couvercles plutôt qu’un pour faire imploser la marmite gouvernementale,
devrait-on comprendre en voyant les images de cette publicité subversive pour
ne pas dire submersive.
La campagne pré-électorale a
donc été officiellement lancée par cette vidéo.
J’ouvre ici une parenthèse. La
plus grande surprise de la semaine a été d’entendre Martin, un jeune communicateur
(27 ans), dire pendant la pause déjeuner qu’il avait été complètement chaviré
en voyant le documentaire sur notre regretté député - poète Gérald Godin et sur notre non-moins regrettée Pauline Julien que j'aimais, qui m'avait un jour, pris les deux mains en me reconnaissant, en souriant affectueusement et dont les mots ne sortaient plus de la bouche, elle qui les aimait tant.
Et de dire :
« Wow, j’étais cloué sur
mon fauteuil.
« Que s’est-il passé? Jusqu’à
ce printemps…
« Je ne reconnaissais pas
le Québec, m’a-t-il dit, ça devait être une période extraordinaire, cette
passion et cette verve qui animaient les gens tous partis confondus! Cette
assurance de leurs convictions sans peur… »
Je rajoutais et sans faux
fuyants. Cette discussion a attiré autour de nous plusieurs personnes (moyenne
d’âge 29 ans) qui avaient toutes à dire passionnément un ou deux points de vue
sur la chose politique d’ici, en lien avec ailleurs.
Et le jeune de conclure: « Tout
ça pour dire qu’on dirait que la passion est revenue. »
"Tout ça pour dire" étant l'expression qu'il utilise chaque fois qu'il termine de discuter d'un sujet ou pour récapituler ce qu'il croit avoir compris.
"Tout ça pour dire" étant l'expression qu'il utilise chaque fois qu'il termine de discuter d'un sujet ou pour récapituler ce qu'il croit avoir compris.
Éclat de rire alors que cette
passion était palpable pendant ce déjeuner.
Je referme ici la parenthèse
pour reprendre la citation de Eco : alors réflexion critique ou invitation
à l’hypnose?
Ce printemps 2012, le Québec s’est
réveillé d’une longue hypnose par le tintamarre des casseroles et des prises de
position.
Ce qui nous ramène au sujet des futures diffusions de messages/images plus
politiques les unes que les autres auxquelles nous aurons droit d’ici quelques
semaines puisque la campagne électorale commencera officiellement cet été si l’on
en croit les rumeurs qui persistent.
L'intérêt suscité par les étudiants
et le réveil politique qu’ils ont provoqué de par l’intelligence des discours
de leurs leaders, du leadership de ces derniers, du poids de leurs mots mesurés
à l’écran et de chacune de leurs interventions, ajouté à cela leurs sourires en
voyant les politiciens agir devant eux, devrait servir d’exemple voire même de
modèle. Ils ne se sont pas divisés ni n’ont
changé l’objet ni le sujet de leur bataille en cours de route. Focus.
Ils ont donné l’exemple qu’il nous
faut maintenant débattre des véritables enjeux plutôt que faire diversion et de
nous faire assister à du mauvais Vaudeville. J’aime trop le théâtre pour qu’on
mélange les genres ici.
La politique est chose sérieuse et
doit être prise au sérieux. Nous ne sommes plus à l’ère du pouvoir pour le pouvoir,
moto d’un autre siècle. Nous sommes à l’ère du bilan de nos richesses communes,
physique et humaine, pour trouver la juste manière de les exploiter et de les redistribuer équitablement.
Nous avons tous la responsabilité
sociale de faire de ce monde, un monde pour lequel les injustices quelles qu’elles
soient n’aient plus leur place.
J'ai un très grand respect pour les
institutions. Je n'ai pas de respect pour le gaspillage d'énergie ni de temps.
Je choisis aussi mes guerres et mes batailles. Et la bataille de l’image
sans fondement ne reçoit plus d’écho dans ma tête. Je la zappe.
Nous, les Québécois n’aimons pas les
coups bas portés sur des personnes. Les publicités servent à d’autres fins qu’à
celles du dénigrement personnel.
Continuer sur la voie des messages du
dénigrement et des attaques personnelles pour quelque politicien que ce soit aurait
comme résultat le « retour en arrière » de l’écœurement de la politique et du désintérêt
général. De l'hypnose.
Le temps d'antenne et les points picas
sont trop précieux pour que nous les gaspillions dans des futilités ou dans des
salissages en règle.
Pendant que j’écrivais ce
texte, mon merveilleux et doux - exécrable ami (je rectifie sur sa demande: sexe symbole rural et préhistorique) Jean-Jacques
Lemêtre, compositeur et musicien du Théâtre du Soleil d’Ariane Mnouchkine
http://www.theatre-du-soleil.fr/thsol/index.php?lang=fr
, m’envoyait cette vidéo que j’ai pris le temps de visionner avant de le terminer.
Parce que les mots, les images, les lettres et le temps précieux
s’envolent.
The Fantastic Flying Books of Mr Morris Lessmore (2011)
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